Quentin Mauxion – Gestionnaire de patrimoine

Assurance vie : l’art de rédiger une clause bénéficiaire optimale

Pour transmettre votre capital dans les meilleures conditions grâce à l’assurance vie, il convient d’apporter une attention particulière à la rédaction de votre clause bénéficiaire.

Certainement l’élément essentiel du contrat d’assurance vie, la clause bénéficiaire permet au souscripteur de désigner la ou les personnes qui recevront le capital au dénouement du contrat.

Elle exprime ses volontés en matière de transmission de son patrimoine.

Elle doit donc être rédigée avec le plus grand soin pour ne pas donner matière à interprétation, et doit être actualisée à chaque moment important de sa vie afin de revoir éventuellement les intentions de transmission du souscripteur.

2 types de clause bénéficiaire

Seul le souscripteur peut la rédiger et la modifier à tout moment, et ce, sans formalité particulière, sous seing privé ou dans un testament déposé chez son notaire. Dans ce cas, il faut bien veiller à ce qu’elle soit toujours valable en cas de modification ou de révocation du testament et en aviser l’assureur.

Il existe deux types de clause bénéficiaire : la standard et la libre, cette dernière ouvrant la possibilité de multiples clauses annexes.

La première, proposée par défaut dans les contrats d’assurance vie, répond aux situations et aux objectifs les plus courants en désignant les bénéficiaires selon un ordre successoral classique et non pas de façon nominative. Il est nécessaire de bien faire attention à ce type de clause pour les partenaires pacsés et les couples en cours de divorce (non séparés de corps).

La seconde offre une totale liberté au titulaire du contrat dans le choix des bénéficiaires (parents ou personnes sans lien de parenté) et dans les modalités de répartition des capitaux décès… Il convient, alors, d’être extrêmement précis sur la désignation des bénéficiaires et dans les termes utilisés. Désigner nominativement le conjoint est à éviter car il pourrait rester bénéficiaire même en cas de divorce postérieurement à la rédaction de la clause. 

Quelle que soit la clause retenue, il est recommandé de la compléter par un second « rang » et de la terminer systématiquement par le dernier « rang » « à défaut mes héritiers ». Ces derniers percevront, ainsi, le capital en proportion de leurs parts héréditaires, en l’absence de bénéficiaires de 1er rang.

En présence de plusieurs bénéficiaires, la part attribuée à chacun doit être indiquée explicitement, soit en pourcentage, soit par une mention telle que « à parts égales entre eux ». 

Enfin, il est conseillé de prévoir la représentation des bénéficiaires. En effet, celle-ci n’étant pas automatique, elle doit être expressément précisée. Elle permet, en cas de décès ou de renonciation d’un bénéficiaire, de répartir sa part au profit de ses représentants uniquement en ligne descendante (enfants, petits-enfants…).

La clause est-elle modifiable à tout moment?

Attention à la notion de bénéficiaire acceptant.

Tant que le bénéficiaire n’a pas accepté le bénéfice du contrat du vivant du souscripteur, il peut être modifié à tout moment.

Pour les personnes vulnérables, cette modification peut nécessiter l’intervention du juge des tutelles ou du curateur.

Les souscripteurs de plus de 85 ans sont soumis à une procédure d’examen systématique afin de vérifier l’opportunité, pour l’adhérent, de l’opération envisagée.

En l’absence de bénéficiaire, ou en cas de clause ambiguë ne permettant pas de les identifier, le montant du contrat tombera dans la succession, perdant ainsi les avantages juridiques et fiscaux de l’assurance vie.

Attention également à la rédaction d’un testament a postériori de la rédaction d’une clause bénéficiaire.. Effectivement, le rôle du testament est d’organiser les dernières volontés du testateur, il sera donc prioritaire sur la clause bénéficiaire si le testament a été rédigé en dernier et sans distinction du patrimoine…

Qui peut être bénéficiaire d'un contrat d'assurance vie ?

S’il est possible de désigner aussi bien une personne physique que certaines personnes morales (association d’utilité publique, par exemple), la loi pose quelques limites.

Une clause rédigée en faveur du médecin ayant traité la maladie à l’origine du décès de l’assuré, de son notaire ou d’un animal est interdite.

primes manifestement exagérées

Autre limite : les primes «manifestement exagérées» sont susceptibles de remettre en cause la liberté de désignation et d’être réintégrées dans l’actif successoral de l’assuré.

Bien qu’il n’y ait pas de montant précis, les juges apprécient cette notion au moment du versement des primes et au regard, notamment, du patrimoine, des revenus et du contexte familial de l’assuré.

Démembrement de la clause bénéficiaire : un levier stratégique aux implications majeures

Le démembrement de la clause bénéficiaire est un outil patrimonial puissant permettant de répartir les droits issus d’un contrat d’assurance vie entre un usufruitier (souvent le conjoint survivant) et un nu-propriétaire (généralement les enfants).

Cette stratégie offre plusieurs avantages, notamment la protection du conjoint survivant tout en préparant la transmission aux héritiers, avec une fiscalité optimisée.

Toutefois, elle implique des contraintes :

  • le quasi usufruitier peut librement disposer du capital mais enregistre une créance de restitution en « contrepartie »,
  • la reconstitution de la pleine propriété à son décès peut soulever quelques complexités juridiques et fiscales.

 

Une rédaction précise et justifiée de la clause est donc essentielle pour éviter tout litige.

Il est possible de prévoir une clause de remploi pour imposer une réutilisation encadrée du capital et d’intégrer une reconnaissance de dette pour protéger les nus-propriétaires en cas de litige.

Il convient de vous rapprocher de votre conseil afin d’étudier cette solution en fonction de votre situation familiale et de votre patrimoine.